Mixtures

No. 7 - Décembre 1997

Dans ce numéro:


Troisième congrès annuel de la FQAO
par Denis Morneau

Au pays du Bas-Saint-Laurent, les habitants parlent plus de la mer que du fleuve. Cette nuance du langage porte en elle l’odeur des algues, la vaste étendue d’un plan d’eau et le vent qui trouve là l’espace d’un voyage. La région connaît aussi un autre vent, domestiqué celui-là, qui fait chanter le bois et le métal de ses nombreux orgues, récents et anciens.

Les 14 et 15 août dernier, un groupe d’amateurs est parti vers l’est pour écouter et voir la beauté de ces instruments, et pour prendre acte d’une vie musicale qui a du souffle. Organisé conjointement avec l’excursion annuelle des Amis de l’orgue de Québec, le troisième congrès annuel de la Fédération québécoise des Amis de l’orgue a pris l’allure d’une expédition en six étapes, à la découverte d’autant d’instruments aux qualités indéniables. Voici donc la chronique d’un congrès « pèlerin ».

L’ouverture de l’événement avait lieu en l’église Saint-Patrice de Rivière-du-Loup où Claude Girard a d’abord présenté l’histoire et les traits caractéristiques de l’instrument Casavant/Guilbault-Thérien dont il est le titulaire. Il a ensuite offert un récital où dominaient des œuvres transcrites pour orgue. En plus de pouvoir apprécier le talent d’interprète de l’organiste, les auditeurs ont également pu, à cette occasion, mesurer le degré de son attachement pour l’orgue de Saint-Patrice.

Après un excellent dîner à la salle à manger de l’hôtel Château Grandville, le groupe s’est dirigé vers la municipalité voisine où nous attendaient deux témoins du passé. À un premier titre, l’église Saint-Georges de Cacouna qui est classée « monument historique » et que nous a présentée madame Lynda Dionne. En second lieu, l’orgue du lieu, œuvre du facteur Eusèbe Brodeur, qui fait partie des orgues anciens du Québec. Pour donner la pleine mesure des qualités de l’instrument, l’organiste Josée April a brillamment interprété des œuvres puisées dans le répertoire ancien.

Plus à l’est encore, l’étape suivant du congrès se trouvait à Rimouski. Notre groupe a d’abord été reçu à l’Hôtel de ville de l’endroit où le maire offrait une réception à l’occasion de la cinquième Académie internationale d’orgue et de clavecin de Rimouski. Il va sans dire que la réunion de tous ces gens provenant de régions et d’organismes différents faisait de l’événement un véritable carrefour de l’orgue québécois. C’était aussi l’occasion choisie pour le lancement du dernier disque de Jean-Guy Proulx, dans la collection « Cathédrales en musique », enregistré à la cathédrale Saint-Germain de Rimouski.

En soirée, tous se retrouvaient au concert d’orgue et de clavecin donné par Kenneth Gilbert dans le cadre de l’Académie. Présentée à l’église Saint-Pie-X de Rimouski, cette soirée de musique était intitulée « Promenade à travers les quatre nations » et, par le répertoire choisi, nous faisait traverser l’Italie, l’Angleterre, l’Allemagne, et la France. Soulignons que les qualités de l’interprète, de même que celles des instruments et de l’acoustique du lieu, ont certes contribué à créer, ce soir-là, un événement mémorable. Après quoi, un peu de repos était bienvenu.

Le lendemain matin, nos fervents de l’orgue avaient rendez-vous à la cafétéria de l’Université du Québec à Rimouski pour le déjeuner, et pour assister à une activité fort attendue. En effet, au terme du repas, sœur Pauline Charron nous a dressé un portrait de la vie musicale à Rimouski. Membre de la congrégation des Sœurs de Notre-Dame-du-Saint-Rosaire, professeure de piano et d’orgue, sœur Pauline suit, de près et depuis longtemps, les activités musicales de la région. Son témoignage nous en a fourni une preuve très éloquente.

Par la suite, les membres de la Fédération se sont dirigés vers la salle Saint-Germain de la cathédrale pour la tenue de leur assemblée générale annuelle; c’était l’heure du bilan et des échanges prospectifs. Pendant ce temps, le groupe des Amis de l’orgue de Québec s’est rendu à l’église de Sainte-Luce-sur-Mer pour découvrir l’orgue qu’a joué Joseph Bonnet pendant la Deuxième guerre mondiale.

C’est également Joseph Bonnet qui, en 1921, donna le concert d’inauguration du nouvel orgue Casavant de la cathédrale Saint-Germain. Réunis à cet endroit en fin d’avant-midi, les deux groupes ont assisté à un entretien sur la réfection des orgues au Québec par la maison Guilbault-Thérien depuis vingt ans. Concrètement, le facteur d’orgues, Guy Thérien, et l’organiste titulaire, Jean-Guy Proulx ont illustré leur propos par la démonstration de l’instrument de la cathédrale. Installés dans le chœur tout près de l’orgue, les auditeurs ont suivi, avec grand intérêt, cette rencontre à saveur pédagogique.

Après le dîner servi à la cafétéria de l’Institut maritime du Québec, le groupe s’est rendu, cette fois, à l’église Sainte-Cécile du Bic où Jacques L’Italien a présenté, dans ses grandes caractéristiques, l’orgue Casavant/Guilbault-Thérien. Marc D’Anjou a ensuite pris le relais en offrant un récital composé, en bonne partie, d’œuvres du répertoire symphonique, une prestation qui n’a certes pas déplu à la patronne du lieu…

Enfin, dernière étape de la tournée, les participants se sont dirigés vers la remarquable église Notre-Dame-des-Neiges de Trois-Pistoles. Outre l’architecture extérieure surprenante de l’édifice, c’est probablement le décor grandiose de l’intérieur du temple qui retient davantage l’attention. Et l’orgue n’est pas en reste. Présenté par Marc d’Anjou et joué par Dominique Coulombe, l’orgue Casavant/Guilbault-Thérien aura donné, au congrès, un heureux couronnement.

J’ai parlé, plus haut, de cette tournée comme d’un véritable carrefour de l’orgue. Aussi, il me semble qu'après un tel événement, nous devons reconnaître que la vie de l’orgue connaît, au Québec, une croissance et un développement sensibles. Ce constat devrait, me semble-t-il, nous stimuler dans la consolidation de nos acquis et la mise en œuvre de nouveaux projets.


Entretien avec Jean Boyer
sur la facture d'aujourd'hui
(1re partie)
par Hellmuth Wolff
N.D.L.R. Le 28 janvier 1993, le facteur d'orgues Hellmuth Wolff s'entretenait à bâtons rompus avec l'organiste français Jean Boyer dans le TGV entre Lille et Lyon sur l'état de la facture d'orgue d'orgues d'aujourd'hui. Voici l'essentiel de cet échange d'idées. Avec la permission de l'auteur, nous reproduisons cet article paru l'an dernier dans le ISO Yearbook (International Society of Organbuilders).


J'aime beaucoup ce que vous dites dans votre entretien déjà mentionné avec Bernard Hédin au sujet du rapport des musiciens avec leur instrument.1 Vous prenez l'exemple du violoniste qui traite son instrument avec un soin énorme. Quand vous dites que vous détestez les orgues avec des consoles détachées de vingt mètres, je vous comprends. En même temps, les quelques fois que j'ai fait une console détachée, non à vingt, mais seulement à deux ou trois mètres, je trouvais que le travail de l'harmonisation de la console était grandement facilité. On entend mieux ce qui se passe, et si la mécanique est réussie, je pense qu'on peut quand même avoir un bon contact avec l'instrument.

JB: Je ne demande qu'à le croire! D'ailleurs je connais quelques rares réussites de ce genre. Mais je pense qu'il faut toujours trouver un équilibre entre entre perfection mécanique et recul. D'abord la question de l'équilibre des plans sonores tel qu'on l'entend à la console. Souvent, tout ce que l'on gagne d'un côté, on le perd de l'autre. Avec un éloignement raisonnable où l'on est toujours près de son instrument, on a une vue d'ensemble homogène, au lieu d'avoir une vue partielle et déséquilibrée. Mais on risque forcément de perdre un contact physique sous ses doigts. S'il n'y a pas une trop grande perte de ce contact, je ne demande pas mieux. C'est aussi une question de taille de l'instrument. Là où l'on souffre le plus de ne pas entendre l'orgue avec un peu de recul, c'est dans les grands instruments verticaux comme on peut en trouver en Hollande. On ne profite absolument pas de l'orgue en le jouant, parce que le Bovenwerk et même le Hooftwerk se trouvent très haut, de sorte qu'on reste toujours dans le brouillard à la console. C'est effectivement dommage, mais j'imagine mal comment on aurait pu résoudre un tel problème.

HW: Cela dépend aussi de la disposition des claviers. Quand on a un orgue à deux claviers avec Grand-orgue et Positif et la Pédale flanquée des deux côtés, on peut très bien avoir un équilibre, on entend les sons indirectement. Mais dans le cas d'un Brustwerk, quand les autres plans sonores proviennent d'un Positif ou d'un Oberwerk, il devient plus difficile de s'entendre jouer.

JB: C'est souvent le cas, justement avec les Brustwerk. Je n'aime pas trop ces plans sonores très agressifs pour l'exécutant. Il me faut toujours « imaginer » et se convaincre que c'est parfait, « d'en bas »...

HW: Dans l'histoire, le Brustwerk n'est pas si fréquent pour un orgue à deux claviers. Le Brustwerk arrivait au troisième plan, après le Positif. Sa position reculée donnait des effets d'écho et pouvait très bien servir les besoins de l'accompagnement de la chorale.

Nous parlions de dispositions de claviers, d'agencement à l'intérieur de l'orgue, de la mécanique, de la console. Pouvez-vous élaborer un plus sur ce que vous aimez dans une mécanique ?

JB: C'est toujours très difficile à définir : ce sont plutôt des impressions tactiles que je ne saurais pas quantifier. Je crois que ce qui est important pour la mécanique d'un orgue, disons de style baroque, c'est précisément cette proximité qu'on a entre le toucher et le son. Il est avant tout important qu'une mécanique soit complémentaire d'une harmonie. On ne peut pas mettre n'importe quelle mécanique sur n'importe quel type d'harmonisation. J'ai fait l'expérience de jouer dans la région flamande ou en Hollande du sud des orgues fortement influencés par la France, des orgues avec des compositions et même des harmonies presque françaises ; néanmoins, ces orgues ont une mécanique avec des mouvements horizontaux au lieu des mouvements verticaux, à la française, et on s'aperçoit en jouant, qu'on ne fabrique plus le son de la même façon que sur un orgue français, bien que l'harmonisation en soit assez proche.

C'est très curieux! Il y a des mécaniques qui sont le prolongement du tuyau et d'autres qui ne sont qu'un lien entre la touche et la soupape, sans action véritable sur le tuyau. Cela arrive souvent quand on a une harmonisation préfabriquée, c'est-à-dire des tuyaux qui ont des attaques excessives ou encore avec une mécanique qui n'est pas du tout sensibles au relevé de la touche. Le timbre est figé et on a l'impression que, si on mettait trois organistes qui jouent différemment, l'instrument sonnera tout à fait pareil. Une bonne mécanique devrait permettre aux trois organistes de laisser une impression sonore différente, d'avoir leur son.

Personnellement, l'une des composantes mécaniques qui me tient le plus à coeur est le relevé de la touche. Je pense que c'est là-dessus, peut-être de manière artificielle, de manière un peu illusoire, qu'on peut agir. La première chose que je demande à une mécanique, c'est d'être le prolongement du son. La deuxième chose, c'est qu'elle soit très précise. Mais, dans ce domaine, on est peut-être allé un peu loin dans les vingt dernières années. On s'est dit que la performance d'une mécanique était liée à sa légèreté. Mais attention : une mécanique excessivement légère peut brider l’organiste et le desservir. Jouer sur une mécanique-qui-ne-pardonne-rien, sur laquelle la moindre éraflure devient une catastrophe est un réel supplice! Au lieu d’affiner son toucher, on pense avant tout à jouer « propre » et à limiter les dégâts! Mais il est bien entendu qu’un orgue dont la mécanique est dure, de sorte que l’organiste ne puisse jouer sans faire intervenir ses bras ou même son buste est un mauvais orgue!

HW: Trouvez-vous qu'on devrait faire une différence selon que la mécanique est pour un orgue de conservatoire, un orgue d'église où d'une salle de concert? Les élèves d'un conservatoire ne devraient-ils pas être capables de jouer sur une mécanique très sensible? Pour une église ou une salle de concert, ne devrait-on pas faire le toucher un peu plus ferme? Par exemple, j'étais étonné d'entendre le commentaire d'un organiste chevronné en tournée qui trouvait la mécanique d'un orgue dans une salle de concert « casse-gueule ». Pour un orgue qui sert à des récitals, ne devrait-on pas faire une mécanique plus « sécuritaire »?

JB: Non. Je suis contre les mécaniques standard et c’est souvent ce que m’évoque le mot « sécurisant ». Vous savez, ces orgues où il suffit d’arriver deux heures avant le récital et tout se passe bien, sans surprise. C’est quand même beaucoup plus, ce que j’attends d’un orgue ! S’il y a adéquation totale entre la mécanique et l’harmonie, cela suppose, bien-sûr, quelques risques à prendre. Mais c’est une question de limites. Quand on joue mal à l’aise, on ne peut pas exprimer grand chose. On subit…

HW: Lorsque je me demandais si un orgue d'église devrait avoir une mécanique plus sécuritaire, je ne voulais pas dire par là que ça serait une mécanique moins sensible. Elle répétera aussi bien, mais il y aura une plus grande marge de sécurité que ce que je ferais pour un instrument qui est destiné à servir à l'enseignement.

JB: Sans doute. En tous les cas, ce dont je suis absolument certain aujourd'hui, c'est que la qualité essentielle d'une mécanique n'est pas sa légèreté. C'est beaucoup plus une question de malléabilité.

HW: Si on consulte Dom Bedos pour le tracé de la mécanique, on est censé accrocher la mécanique au milieu de la touche. Cela nous donne très peu de course pour la soupape, et la soupape fait très peu de chemin pour le relevé de la touche. De plus, une si petite course affecte plus le réglage, car elle amplifie les changements dimensionnels qui peuvent arriver entre la touche et la soupape. À mon avis, on est mieux servi par le modèle de Clicquot à Souvigny, où la mécanique est accrochée aux trois cinquième du pivot de la touche. Donc, un peu plus de course à la soupape, un peu plus de course pour le retour de la mécanique et une plus grande marge de sécurité.

JB: Oui, pour moi, l'orgue de Souvigny est un modèle. Il reste que cette mécanique sert un orgue français avec une harmonie bien définie et que la même mécanique sur un orgue de type Schnitger ne conviendrait pas forcément. On ne fait pas le son de la même façon. Par exemple, le son des principaux des orgues en Hollande s'épanouit au fur et à mesure. Il y faut une articulation tout à fait différente de celle d'une montre française, dans laquelle le son est, comment dirais-je, déjà prêt à l'attaque. Vous voyez ce que je veux dire ?

HW: Oui oui, il s'agit justement de la différence dans la méthode d'harmonisation. La montre française est approvisionnée avec un débit de vent déjà contrôlé au pied; les bouches sont plus basses, la taille est un peu plus grosse que celle d'un principal hollandais ou allemand où le volume est contrôlé à la bouche. L'attaque se fait d'une façon tout à fait différente, cela prend plus d'effort pour un principal allemand à initier le son, et donc la mécanique doit correspondre à ce genre d'harmonie. Mais je suis sûr que si les Français ont si bien réussi leurs mécaniques, c'est parce qu'ils s'en tenaient à un modèle. Ils raffinaient le tracé de la mécanique pendant des siècles, tandis que les Allemands variaient de type d'orgue et d'agencement mécanique. Ils faisaient aussi des orgues avec des touches à un seul bras, mais les mécaniques faisaient des détours, la laye du Hauptwerk étant en arrière, ce qui donne déjà plus de flexibilité à l'attaque.

JB: Il faudrait aussi aborder la question de la longueur des touches qui varie, au XVIIIe selon les pays. Dans les pays nordiques, vous avez des touches souvent plus longues qu’en France. Là, il faut encore rechercher l’équilibre. Des touches courtes sont très avantageuses pour le toucher d’une mécanique suspendue. Mais, en revanche, on peut difficilement allonger les doigts ou jouer dans des tons éloignés. Si cela n’est pas gênant pour le répertoire classique français, il en va déjà tout autrement lorsqu’on veut jouer Bach. Si c’est un instrument qui est destiné à jouer un répertoire encore plus large mais qu’on décide quand-même d’utiliser une mécanique suspendue, il faut faire très attention de ne pas raccourcir exagérément la profondeur des touches. Je ne sais pas comment cela se passe chez vous, mais en France, on a beaucoup de mal à discuter de ces problèmes.

HW: Je pense que le problème tient au fait qu'on s'attire des ennuis aussitôt qu'on tente de modifier le tracé de la mécanique, qui est si bien établi en France. Il faudrait tout de même s'en tenir à des normes qui correspondent aux exigences du répertoire.

JB: Sans revenir aux normes établies au XIXe lors du congrès de Malines, il ne me semblerait pas déplacé d’essayer d’en définir de nouvelles, tenant compte des apports récents des techniques anciennes d’interprétation et des techniques, disons, plus traditionnelles. Beaucoup de facteurs d’orgues (ou d’experts!) pensent qu’il doit être possible à l’organiste de s’adapter chaque fois à des normes si différentes. C’est effectivement possible, mais au détriment d’une exécution « travaillée ». C’est pour nous terriblement réducteur, je vous l’assure!

HW: Dans cet ordre d'idées, on pourrait aussi parler du pédalier par rapport au clavier. En Amérique, nous avons le standard de la guilde des organistes américains (AGO). À mon avis, ce standard a été fait pour que l'organiste soit confortablement assis à la console.

JB: Avec des pantoufles!

HW: Cette configuration n'est pas vraiment pour la performance. C'est plutôt pour pouvoir durer tout le long du service. Le pédalier est poussé trop en avant, donc on n'est pas assis sur le bord du banc pour avoir toute la liberté de mouvement des jambes, et on ne peut avoir une bonne position dorsale et être en équilibre pour donner le meilleur de soi.

JB: Par contre, en France, le retour quasi systématique à une disposition contraire, inspirée des côtes anciennes nous place souvent dans une position très inconfortable ou instable. Là aussi, je pense qu’il faudrait redéfinir nos exigences en fonction de notre nouvelle technique.

HW: Surtout si on tient compte du fait que les hommes du 18ème siècle étaient plus petits qu'aujourd'hui. Un incident qui illustre peut-être ce problème se produisait en 1981, lors du symposium de l'université McGill, quand Peter Williams me reprochait d'avoir fait trop de compromis, et de ne pas avoir assez suivi les mesures de console des anciens. Alors, je lui ai dit que j'avais fait des sondages parmi les organistes qui jouent sur différents types d'orgues mécaniques pour savoir comment ils se sentent à leur console. Ce n'est pas moi qui vais leur dire comment se positionner, mais j'ai pris les dimensions qui leur convenaient bien pour l'orgue de McGill et je les ai publiées. Je pense que c'est de cette façon-là qu'on peut progresser. Juste en disant qu'on n'est pas allé assez loin dans l'historicité ne nous mène nulle part.

JB: Tout à fait. Pour revenir au pédalier, je trouve que la technique, de pédale la plus équilibrée est celle de Bach. Pour moi, ce doit être la référence. À l'heure actuelle, on doit pouvoir guider sa pédale de la même façon qu'on guide ses mains, avec la même possibilité d'action, de toucher et aussi d'aisance des mouvements. Donc, cela exclut, effectivement, le pédalier trop enfoncé dans le soubassement. Cela exclut aussi les pédaliers en éventail, à l’américaine, parce que ce sont des pédaliers qui favorisent beaucoup trop l'emploi du talon par rapport à la pointe. À ce sujet, je ne fais pas du tout un principe du jeu de pédale pied-pointe exclusivement. Mais il n'y a pas de secrets : lorsqu’on appuie la touche avec la pointe, on peut suivre de manière tout à fait efficace le relevé de la touche. Le talon ne permet pas cela parce que son articulation est plus raide.

HW: Le levier de la touche est plus court ce qui rend le contrôle sur le relâchement de la note plus difficile.

JB: Bien sûr, donc, dans la mesure du possible, tout ce qui peut favoriser le jeu de pointes est meilleur pour la musique.

HW: On retrouve plus facilement les distances quand les touches sont parallèles. Si elles sont à l'éventail, on doit toujours frôler les dièses pour trouver ses rapports. Avec le pédalier parallèle, on peut plus facilement prendre des risques et jouer portato juste avec les pointes.

JB: Absolument. Maintenant, il y a aussi la question du pédalier complètement plat. C'est aussi un problème dans la mesure où l'on a besoin, maintenant, de pédaliers d’une étendue maximale. Les pédaliers plats, du temps de Bach, avaient une étendue plus réduite : do1 au do3 ou ré3. Aujourd’hui, on veut aller au fa3 ou sol3. Avec des pédaliers plats, il faut des jambes bien longues pour atteindre les extrêmes! Personnellement, une légère concavité ne me dérange pas.

HW: Il y a une différence dans la pratique maintenant entre l'Amérique et l'Europe. L'Europe s'est branchée sur les mesures du Bund Deutscher Orgelbauer (BDO). En Amérique, nous nous sommes alignés sur l'exemple de John Brombagh, qui a décidé que 60 mm était le bon espacement entre les tons. Cela correspond àpeu près à la distance qu'on a avec le pédalier en éventail A.G.O. à 15 cm avant les nez des dièses. Par rapport aux normes européennes, cela rapproche le dernier fa ou le premier do de 5 cm. Je n'ai encore jamais rencontré des gens qui trouvaient cet espacement trop étroit ni ces pédaliers trop larges. De toutes façons, on joue avec le pied oblique. On pourrait dire méchamment que les mesures du B.D.O. sont faites pour des fermiers qui viennent labourer leur terre avant de toucher l'orgue!

JB: Je n’aime pas, non plus, les pédaliers à espacement trop large. Mais on nous ressasse que si les anciens jouaient sur des orgues comme ça, il n’y a pas de raisons pour que nous n’en fassions pas autant, aujourd’hui. C’est vouloir que la technique des anciens soit la seule à être efficace et ignorer délibérément que nous avons appris beaucoup des techniques postérieures.

HW: J'entends maintenant dire parmi mes collègues européens qu'on donne des directives de plus en plus strictes et poussées sur la manière de faire son orgue. Avant, on regardait si on avait soudé les calottes, mais maintenant, on fait la moue pour le moindre écrou en plastique. Il faut qu'ils soient en cuir, même si on sait très bien que le cuir va sécher, puis glisser.

JB: En effet, on est très pointilleux sur ces questions-là; on juge un facteur d'orgues sur les matériaux qu'il utilise. Est-ce qu'il fait ses sommiers en chêne, est-ce que ses porte-vent sont en plomb, est-ce qu'il fait ses claviers en os?... Alors là, c'est un bon facteur! Le résultat peut être déplorable, on peut hériter d’une mécanique à problèmes, d’une harmonie désastreuse, ça reste quand même un bon facteur d'orgues! Je suis de plus en plus irrité par cette attitude. N’en déduisez-pas, non plus que je n’aime pas, pour un orgue, les matériaux nobles! Bien au contraire.

HW: On cherche des choses tangibles pour pouvoir cerner quelque chose qui ne l'est pas facilement. Pour les devis, c'est la même chose. On ne peut faire le devis d'un orgue comme on fait le devis d'un bâtiment. On peut déterminer la qualité d'un bâtiment en termes de matériaux on utilise: ciment, acier, tout ça... Mais avec l'orgue, c'est plus subtil. Quand on arrive à l'harmonie, on est complètement dépassé.

JB: On peut voir à la réception d'un instrument si vous avez bien fait vos sommiers, si les chapes sont fixées avec des clous forgés, si tout est conforme au cahier des charges. Mais comment expliquer en quoi une harmonie est incohérente, pourquoi il y a déséquilibre? C'est vraiment là, la difficulté.

HW: Un autre phénomène qui a surgi en Europe depuis quelques années, ce sont des facteurs d'orgues qui deviennent experts. Autrefois, on avait souvent recours à des collègues pour l'acceptation d'un orgue, ce qui a causé beaucoup de problèmes de jalousie. Comment peut-on être impartial envers un compétiteur? Mais quand un facteur d'orgues devient expert et dicte comment l'orgue doit être fait, réalise le dessin et les tailles, enlève tout ce qui est stimulant et fait des facteurs des simples exécutants, alors je trouve que c'est intolérable. Il y a des situations où le même expert est partie prenante, une fois il s'associe avec un autre facteur d'orgues pour un projet, une autre fois il joue le rôle de l'expert. Heureusement, cela se passe autrement en Amérique. Par exemple, si nos clients sont sérieux, ils commencent par nous demander nos idées, ils nous invitent à visiter l'endroit, l'église, l'université. Ils nous paient les frais de déplacements. D'abord, demander nos idées, c'est déjà bon signe. En même temps, j'aime bien savoir ce qu'ils attendent de nous. C'est réciproque, on veut faire un orgue qui correspond vraiment aux besoins d'une paroisse et au goût du musicien en place, en sachant qu'il y a d'autres qui vont suivre. Nous allons tenir compte de tout ça. C'est l'idéal, mais ce n'est évidemment pas toujours le cas. Il faudrait que cette façon de procéder ait lieu partout ailleurs, qu'il y ait d'abord un respect mutuel, avant que le projet débute.

JB: Vous dites: le client, c’est la paroisse. Je pense que, quand c'est la paroisse qui fait une demande à un facteur d'orgues, c'est beaucoup plus facile que quand c'est une personne qui lui est extérieure. Il arrive très souvent que nous fassions construire des orgues sans définition précise. Ce ne sont pas les paroissiens qui sont demandeurs et le rôle de l'organiste dans l'église actuelle est, en France, très différent de ce qu'il était dans le passé. Souvent, l'orgue est construit dans une église mais beaucoup plus pensé pour jouer un rôle culturel. Nous sommes trop convaincus qu’une église est préférable à une salle de concerts, donc on espère que l’orgue aura une vocation culturelle dans un lieu qui n’est pas toujours idéal sur ce plan. Alors, il y a une personne plus ou moins influente qui mène le jeu. Dans ce cas bien ambigu, l’orgue ne répond plus aux besoins d’une communauté. Mais il répond aux rêves, aux désirs d’une seule personne. Ce peut être très dangeureux car tout dépend du rêve et de sa cohérence…

À partir du moment où il y a un besoin réel de construire un orgue et que c’est le désir d’une communauté, disons, culturelle ou cultuelle – les deux peuvent être pris en considération –, il n’y a plus d’équivoque: on fait appel à différents facteurs d’orgues… Il y a des choix qui se font sur des devis, il y a aussi des choix qui se font par affinité et qui sont tout aussi importants. Les gens qui commandent un orgue devraient aller voir au préalable d’autres orgues du facteur d’orgues pressenti. Cela peut orienter un choix beaucoup plus facilement et à partir du moment où on sait que c’est en tel facteur d’orgues qu’on a confiance, à ce moment-là, je trouve que c’est beaucoup plus facile de lui laisser carte blanche et de dire: « nous voulons que vous fassiez quelque chose pour notre église. Nous savons ce que vous faites ». Seule condition, et elle est de taille: la compétence du facteur d’orgues doit être vraiment établie.

HW: J'ai oublié de mentionner une chose. Je parlais un peu comme si on n'avait pas d'experts-conseil en Amérique. Nous en avons, mais leur rôle est différent. Quand une paroisse nous approche, ils ont déjà souvent fait un petit bout de chemin avec un conseiller. Ils sont allés visiter quelques instruments que le conseiller leur a recommandés. Et alors, il s'est déjà fait une sélection. Ils retiennent peut-être deux ou trois facteurs d'orgues pour leur soumettre un projet. Le conseiller les a aidés à trouver des facteurs qui conviennent. Mais il ne s'impose pas outre mesure dans le projet. Plus tard, nous allons avoir des rapports avec le conseiller parce qu'il joue un rôle d'intermédiaire. Souvent les conseillers disent au client comment traiter le facteur d'orgues. Par exemple, si le client exige un dessin, il lui dit qu'il serait juste de payer le facteur d'orgues pour le travail. S'il n'y a pas de commande, qu'on paie les choses auxquelles le facteur d'orgues a consacré du temps.

JB: C'est très bien. Je ne crois pas que l'expert doive imposer ou qu’on impose à un facteur d’orgues un style défini, qu’on lui dise: « Faites-nous un instrument français, ou italient, ou… « moderne » dans cette église. Je crois beaucoup au fait qu'un facteur d'orgues soit inspiré par un lieu. Peut-être que plusieurs facteurs d'orgues peuvent avoir des idées différentes pour un même lieu. La confrontation des idées ne manque non plus d’intérêt.

HW: Il se peut qu'un facteur d'orgues ait son style et il faut chercher l'endroit qui convient à son type d'orgue.

JB: C'est-à-dire l’inverse.

HW: S'il fait du bon travail, c'est tout à fait acceptable et respectable. Il y en a d'autres qui peuvent faire plus d'efforts pour se plier aux diverses exigences architecturales, stylistiques et musicales, etc... C'est plus difficile de bien le faire si on laisse un grand éventail de possibilités ouvert. On ne peut pas être spécialisé dans tout, n'est-ce pas!

JB: Je crois qu'une composition d'orgue, même toute simple, et sans parler de l'harmonisation, est toujours dépendante du lieu et de la place, de l'acoustique dont on dispose. On ne peut pas exiger, par caprice, que l’orgue possède tel ou tel jeu dont on aurait bien envie.

HW: Par contre, la situation des églises d'aujourd'hui est particulière. Si les églises deviennent de plus en plus des institutions culturelles, autre chose que des lieux de culte, il faut en tenir compte.

JB: C'est vraiment un problème difficile. À l'heure actuelle, je n'arrive pas à percevoir la place et l'avenir de l'église. Il y a une crise très profonde, il y a comme ci, comme ça, des résurgences mystiques qui laissent à penser que l'église, après avoir été progressiste, pourrait être reprise en main d'une manière réactionnaire, peut-être même extrême. On a toujours construit des orgues dans les églises parce que c'était la paroisse qui les commandait. En tout cas, en France, on a toujours exclu l’idée de l’orgue de salle. À part l’orgue de Trocadéro, les expériences ont été rares et désastreuses. En Allemagne, il y a très souvent un orgue dans une salle de concerts – pas toujours fameux, il est vrai – je ne sais pas pourquoi on refuse systématiquement, en France, d’envisager l’installation d’orgues dans les salles. Ce serait tout à fait autre chose, certainement une autre analyse, une autre perception, mais je suis loin de rejeter une telle expérience.

HW: Sauf que la grande partie du répertoire a été écrite pour le culte. Les concerts d'orgue, c'est de la musique qui a été écrite pour le culte. Le répertoire écrit pour orchestre et orgue, c'est très peu pour justifier un orgue dans une salle de concert.

JB: Oui, mais jouer la musique d’église, en concert, n’est-ce pas déjà un peu paradoxal? L’orgue de concert est celui du XIXe ou du XXe siècle. L’orgue liturgique est plutôt l’orgue baroque. Or, si l’on prend une page de musique ancienne qui a une teinte liturgique très prononcée, il est difficile, voire impossible de l’intégrer dans un office où elle jouerait, aujourd’hui, un rôle identique. Elle n’a plus rien à voir avec le découpage actuel des offices. Mais il est vrai que dans une église, cette musique aura toujours une autre dimension. Un tableau religieux de Rubens sera toujours plus évocateur dans une église que dans un musée. Mais il n’a plus la même fonction. Il faut l’accepter. On ne peut pas recréer quelque chose qui n’existe plus. Par exemple, quand vous allez regarder l’Agneau mystique de Van Eyck à Gand, vous allez dans une église comme si vous alliez au musée. Effectivement, ce tableau est mieux dans une église que dans un musée, mais il a perdu sa fonction; ce n’est plus le retable derrière le maître-autel, ce n’est plus… C’est identique avec la musique. Qu’est-ce qui fait que la musique est une pièce de musée ou ne l’est pas? Je dirais que le musicien qui joue une œuvre a le devoir de lui insuffler la vie… même s’il n’en a pas toujours le pouvoir!

Une cantate de Bach sera toujours sortie de son contexte dans une salle comme dans une église, et ça, on n’y peut rien. En résumé, je ne pense pas qu’une exécution, à l’orgue, dans une salle de concerts en affaiblisse l’œuvre. Le lieu est peut-être moins évocateur mais il a aussi d’autres avantages.

HW: Je vois surgir ce problème aussi comme dans l'enseignement de l'histoire: on doit expliquer le rôle fondamental du christianisme dans notre civilisation, mais les jeunes ne connaissent plus la signification des choses qui nous paraissent à nous évidentes, comme le vocabulaire entourant l'Église. Quelle est la situation en France, où la pratique religieuse chrétienne est dépassée par celle de l'Islam?

JB Ce n'est pas seulement la question d'être croyant ou de n'être pas croyant: je pense que ce sont nos racines, notre propre culture qui sont nourries par la chrétienté. J'ai souvent des élèves à qui je parle d'un choral de l'Avent et qui me regardent avec de grands yeux étonnés qui semblent dire: « Qu'est-ce que c'est, l'Avent? » Ils ne le disent pas, parce qu'ils ont peur de paraître idiots, mais je sens très bien que je dois le leur expliquer.

HW: On a quand même tant d'églises qui peuvent devenir des lieux culturels et qui le deviendront forcément. Donc le cadre plus ou moins superficiel est toujours là.

JB: Quand on pense aux ex-pays de l'Est dans lesquels les églises étaient souvent transformées en salles culturelles, celles-ci n'étaient plus habitées de la même façon et pourtant, l'espace architectural était resté le même.

HW: Elles avaient une mission autre que la mission originale: c'était un endroit où les gens pouvaient se rencontrer sur un terrain politiquement inoffensif. C'était un réconfort. On voyait que cela signifiait beaucoup plus pour les gens de l'Est de pouvoir chanter ensemble. Ils pouvaient le faire, personne ne pouvait être contre. Donc l'église remplissait un rôle très important. Soudainement, cela aussi s'en va.

JB: Pour la création d'un orgue neuf, il y a énormément de subventions en France. Beaucoup d'orgues ont été construits, beaucoup d'orgues ont, aussi, été restaurés. Parallèlement, il n'y a jamais eu autant de bons organistes que maintenant. Il y en a pléthore dans les conservatoires. Les classes d'orgues sont de plus en plus nombreuses. Mais il n'y a absolument aucune passerelle. C'est-à-dire qu'il y a les orgues d'un côté et les organistes de l'autre. Les organistes ne peuvent pas utiliser les orgues, à cause des réticences d’origine plus souvent cléricales qu’administratives et les orgues ne sont jamais joués. Quelquefois, par exemple, tel orgue qui a été restauré dans un petit village reste sans organiste. Laissé à l’abandon, l’instrument aura, cinq ans plus tard, besoin d’une autre restauration…

Les orgues sont dans les églises. Or dans les églises, on a pas besoin des orgues! Dans le meilleur des cas, les prêtres les tolèrent. Inversement, les jeunes organistes d'une part sont peu concernés par tout ce qui est religieux et, d'autre part, n'ont plus envie d'aller servir un répertoire de cantiques complètement décadent, pour ne pas dire grotesque. Je ne sais pas jusqu'à quand durera cette situation, ni ce que sera l'avenir.

HW: Dans plusieurs pays, la situation est analogue, mais ils y arrivent quand même. En Suède, on ne va plus à l'église depuis longtemps, mais l'église continue d'exister quand même, grâce à l'État. Tout le monde veut être enterré selon les traditions. L'État fournit l'argent, personne ne va à l'église, il y a toujours de l'argent et les orgues s'y érigent toujours.

HW: Pour la construction d'un nouvel instrument, on impose la plupart du temps un architecte. Travailler dans une telle situation est beaucoup moins stimulant pour un facteur d'orgues que dans un pays où les gens doivent se battre pour avoir un orgue à tuyaux.

JB: Quant aux concerts, en Scandinavie, par exemple, où l’Église est subventionnée par l’État, j’ai constaté qu’ils n’étaient pas toujours très suivis. Les organistes sont très bien payés et ils reçoivent de l’État, des subsides pour inviter d’autres organistes à donner des concerts. Donc, qu’il y ait du monde ou qu’il n’y en ait pas, ce n’est pas un problème puisque, de toutes façons, l’argent est là. On ne se donne pas de mal pour la publicité, on ne se donne pas de mal d’aller chercher un public. Je trouve ce système absurde, alors qu’à première vue, il semble idéal.

HW: C'est l'État-providence. Par contre aux Pays-Bas, cela fonctionne depuis longtemps dans le domaine de l'orgue: les orgues étant la propriété des villes, les Hollandais ont compris leur rôle culturel bien avant d'autres.

JB: Les Hollandais sont très attachés à leurs orgues. On sait ce qui s'est passé avec Sweelinck. Au XVIe siècle, lors de la Réforme, on a chassé l'orgue des églises mais la ville a immédiatement réagi en disant: on veut entendre nos orgues, il y aura des concerts et on paiera un organiste. Sweelinck est devenu organiste de la ville d'Amsterdam.

HW: Les chants n'étaient pas admis au culte. Sweelinck a publié les psaumes en français pour les Huguenots. Il ne pouvait pas les faire chanter dans son propre pays, sa propre église, car la musique était suspecte pour les calvinistes de son temps.

JB: Il y avait d'une part, le fait que les Hollandais aimaient beaucoup l'orgue, et, d'autre part, le fait que la Réforme en blâmait l’usage. C'est cette conjoncture qui a fait que la Hollande s’attache encore plus à ses instruments. On s’est assuré le concours de facteurs d’orgues prestigieux que l’on a payés très cher avec la réelle conviction d’investir, ce faisant, à long terme.

HW: Dans une vallée protestante de Suisse, le Toggenburg, une autre tradition est née pour combler le manque d'orgue, proscrit de l'église zwinglienne jusqu'au 19e siècle. Les paysans n'ayant pas beaucoup de travail en hiver ont meublé leur temps à partir du 18ième siècle en construisant des orgues pour eux-mêmes et pour d'autres paysans - au delà d'une centaine - afin de pouvoir jouer à l'orgue des psaumes en cachette chez eux!


Mon idée à la base de cette entrevue était de vous demander votre opinion personnelle concernant la manière de faire un bon instrument.

JB: Je ne peux pas répondre. Car à chaque fois que j'ai donné mon avis, que j'ai eu la possibilité de faire construire un orgue, j'ai toujours fait en sorte de m'adresser à un facteur pour lequel j'avais une très grande estime, une très grande confiance. Bien sûr, des discussions font ressortir un certain nombre d’idées, mais le principal pour faire un bon orgue, c'est d'avoir de réelles compétences, une oreille exceptionnelle, une intuition phénoménale, en deux mots, un métier irréprochable. Mais je ne pense pas qu'on puisse et qu’il faille définir des constantes. Je pense beaucoup à la compétence et à l'ouverture d'esprit du facteur d'orgues.

Ce qu'on attend d'un orgue en tant qu'utilisateur, c'est, je crois avant tout, qu'il ait une pensée, qu'il ait une direction et qu’il soit fiable. Quand on écoute un orgue, ce ne sont pas les jeux individuels, même très beaux, qui en font un instrument réussi. C'est la cohésion qu’ils portent en eux. Ainsi vous êtes vous-même mené naturellement vers ce que le facteur d’orgues a pressenti. Il faut que la perception d’un projet soit claire, évidente. C’est valable pour des instruments historiques, du XVIe du XIXe… ou du XXe siècle.


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L'orgue est un véritable instrument de musique que l'on doit aborder avec respect. Il doit être sur le plan de sa facture un chef d'oeuvre accompli. Avez-vous déjà observé un violoniste sortir son instrument de son étui? De quel soin il l'entoure, comme il admire à chaque fois sa lutherie! Et comme lorsqu'il écoute, il ferme les yeux, se met tout près pour mieux l'entendre respirer. (Ne dit-on pas qu'un violon a une âme?) Ce contact intime avec l'instrument, tout interprète doit le rechercher intensément. Cela signifie que tout ce qui ne permet pas à l'organiste de se rapprocher de son instrument est anti instrumental. Pour cette raison, je déteste la traction électrique ou les orgues dont les consoles se trouvent à vingt mètres des tuyaux. Je n'ai jamais compris ce qui pouvait déterminer le musicien à s'éloigner de son instrument. Prendre du recul pour mieux s'entendre? Non, le narcissisme n'est guère compatible avec l'émotion musicale, la vraie.

(Extrait de l'entretien avec Bernard Hédin, Tutti no 24 et Orgues méridionales no. 26, pages 15 et 16).


À la mémoire de
Lucien Poirier, organiste et musicologiste

par Raymond Ringuette
Doyen, Faculté de musique
Université Laval


Lucien Poirier, musicologue et professeur à la Faculté de musique de l’Université Laval, est décédé prématurément le 7 juin 1997, à l’âge de 53 ans, des suites d’une longue maladie. À cet homme dont le souvenir restera sans aucun doute gravé dans nos mémoires, nous aimerions rendre un hommage particulier, témoignage de notre respect et de notre reconnaissance.

Apprécié de tous pour ses qualités humaines indiscutables et doté d’une intégrité exemplaire, Lucien Poirier nous laisse le témoignage d’un homme voué à la recherche de l’excellence. Ses multiples réalisations au cours des différentes étapes de sa carrière de musicologue, d’interprète et de professeur en sont l’expression incontestable.

Détenteur d’une maîtrise et d’un doctorat en musicologie de l’Université de Strasbourg, auteur de plusieurs ouvrages et articles publiés dans des revues et dictionnaires spécialisés, membre de diverses sociétés musicales, il jouissait d’une renommée enviable qui lui valut d’être invité, à maintes reprises, à titre de conférencier tant en Amérique du Nord qu’en Europe. Reconnu également pour la qualité de son jugement, il a été sollicité pour bon nombre de jurys et de comités de lecture de revues musicales. Outre l’étude de l’œuvre du compositeur Georges Migot dont il avait notamment édité le Second livre d’orgue, ses recherches et publications ont porté principalement sur la musique canadienne et son histoire, celles du Québec en particulier. Éditeur pour Le Patrimoine musical canadien de plusieurs anthologies consacrées à l’orgue et aux chansons sur des textes français, il a également dirigé la publication de cahiers de musique pour orgue aux Éditions Jacques Ostiguy. Mais sa contribution la plus importante réside certainement dans l’inventaire et l’étude des données musicales de la presse québécoise depuis sa fondation en 1764. Cette étude sera réalisée ici même, à l’Université Laval, grâce à une équipe formée principalement d’étudiants sous sa direction et celle de Juliette Bourassa-Trépanier. Publiés à Québec en 1990, les premiers résultats figureront dans le volume I du Répertoire des données musicales de la presse québécoise qui éclaire, d’une lumière nouvelle, l’histoire de la musique au Québec entre 1764 et 1799. Incontestablement, il fallait une discipline intellectuelle et des qualités d’esprit exceptionnelles pour entreprendre et mener à terme des travaux de cette envergure.

Moins connu en tant qu’interprète, il a néanmoins donné de nombreux récitals et concerts de musique de chambre au Canada et dans divers pays d’Europe. Ses enregistrements, qu’il s’agisse du disque consacré à la musique d’orgue de Georges Migot, de ceux réalisés pour la collection Les Orgues anciens du Québec ou encore effectués pour la radio de la Société Radio-Canada, lui ont toujours valu des critiques élogieuses. Encore en février 1996, ses qualités d’interprète étaient remarquées à l’occasion de l’enregistrement des œuvres de Pierre Froidebise qui témoignait entre autres d’une sensibilité peu commune.

Pilier de la formation universitaire grâce à ses recherches et à son enseignement, Lucien Poirier n’a pas uniquement contribué au rayonnement de la Faculté de musique. Ses nombreux états de service ont en effet influencé la vie administrative et sociale de la Faculté dont il a été notamment directeur de 1991 à 1994. Ceux qui ont eu le privilège de recevoir son enseignement ou d’y collaborer ont été bien sûr frappés sur l’étendue de ses connaissances, par la profondeur et la clarté de son analyse, par sa curiosité intellectuelle insatiable et par sa grande ouverture d’esprit. Mais ses qualités les plus remarquables se sont sans doute manifestées dans la relation qu’il a su établir avec son entourage. Elle se fonde naturellement sur ces caractéristiques intellectuelles, mais également sur une attitude toute empreinte d’un profond respect d’autrui, d’une disponibilité, d’une courtoisie et d’une générosité peu communes envers les autres. Soucieux du développement de la personne, il était aussi exigeant envers les autres qu’envers lui-même mais ceci, à seule fin de permettre à chacun de donner toute sa mesure. Lorsque nécessaire, il ne manquait pas non plus de prodiguer les meilleurs encouragements. Pour ceux et celles qu’il côtoyait, il savait allier intelligence, finesse d’esprit et d’humour.

Aussi, on se souviendra de Lucien Poirier comme d’un homme de conviction et de cœur qui se dépensait sans compter et pour qui tout ce qui méritait d’être fait méritait d’être bien fait.

Le personnel enseignant et administratif et les étudiants de la Faculté de musique de l’Université Laval.


Ce texte a paru, une première fois, dans le journal de l’Université Laval, Au fil des événements, volume 32, numéro 32, 10 juin 1997


À Bourges,
une rue « Jean-Girard »

par Élisabeth Gallat-Morin

En octobre 1724, un modeste clerc sulpicien de 28 ans, organiste et maître d’école, débarquait à Montréal où il passerait le restant de ses jours à la paroisse Notre-Dame. Il aurait été bien étonné de savoir qu’un jour on donnerait son nom à une rue dans sa ville natale, lui qui se conformait à l’esprit sulpicien de « servir Dieu sans faire de bruit ».

Jean Girard était sorti de l’ombre, dès 1978, avec la découverte par Élisabeth Gallat-Morin du manuscrit de 540 pages qu’il avait apporté avec lui, connu dorénavant sous l’appellation Livre d’orgue de Montréal. Et voilà que le 9 mai dernier, la ville de Bourges rendait hommage à l’un de ses fils qui a été le premier musicien professionnel de Montréal et l’un des principaux acteurs de la vie culturelle du petit bourg de Ville-Marie.

La nouvelle rue Jean-Girard, inaugurée par le maire Serge Lepeltier, en présence de Marcel Masse, délégué général du Québec en France et d’Élisabeth Gallat-Morin, est une jolie petite rue du vieux Bourges, située entre la place Gordaine et la place Saint-Bonnet. Bordée de maisons médiévales qui existaient bien avant son temps, c’est une rue que le jeune Girard dut emprunter bien des fois pour aller du faubourg Saint-Privé tout près, où il habitait avec son père, maître boulanger, pour rejoindre la Sainte-Chapelle où il passe huit ans comme maîtrisien.

La cérémonie du dévoilement de la plaque, qui porte la mention « rue Jean-Girard, musicien en Nouvelle-France, 1696-1765 », eut lieu dans le cadre du 14e congrès de la Fédération française de généalogie, réunissant plus de mille membres. La délégation québécoise était l’invitée d’honneur, cette année, avec une centaine de généalogistes et huit conférenciers.

La veille au soir, dans la magnifique cathédrale, Élisabeth Gallat-Morin relatait la vie de Jean Girard devant plus de sept cents congressistes. Ses propos étaient entrecoupés par des versets du Livre d’orgue de Montréal (Pange lingua, Kyrie et Gloria d’une Messe, Magnificat) joués par Damien Hérisset, titulaire de l’orgue de la cathédrale d’Angers, en alternance avec le plain-chant exécuté par la Maîtrise des Pays de Loire, également d’Angers, sous la direction de Bertrand Lemaire. Le grande curiosité de la soirée fut la participation de l’excellent joueur de serpent, Bernard Fourtet, du Conservatoire de Toulouse, qui soutenait les chantres, tout comme le faisait Jean Girard dès l’âge de seize ans.

Après tant d’hommes célèbres, n’est-il pas réjouissant de voir ainsi honoré un honnête et dévoué musicien et maître d’école qui joua un rôle si essentiel dans la vie de Montréal à ses débuts?


Orgue et Internet
par Irène Brisson

Nous poursuivons notre tourisme électronique avec deux adresses concernant l’orgue.

Le site de la revue américaine The Northeast Organist est un petit bijou, car il permet de naviguer un peu partout, sans avoir à quitter la page initiale et, par conséquent, sans avoir à emmagasiner une kyrielle de références interminales.

Son adresse est très simple :

http://www.tneorg.com

On trouve, sur cette page, outre les renseignements concernant The Northeast Organist, des nomenclatures (avec liens) non exhaustives d’organistes, de compositeurs, de facteurs (essentiellement américains, mais avec quelques ouvertures sur l’Europe, notamment sur la Scandinavie). Ce qui me séduit le plus, c’est la rubrique « organ related resources » qui renvoie à des bibliographies, des adresses de compagnies de disques spécialisées dans l’orgue, et qui présente quelques festivals et académies dont le Centre européen de Marmoutier (foyer rattaché à Silbermann) et l’académie italienne In tempore organi qui aura lieu à Arona (Lac Majeur) du 13 au 26 juillet). Toujours sans quitter la page principale, on accède à la page des orgues en Flandres, avec festivals, instruments historiques, ainsi qu’à Organum, nom de la page de l’orgue en Italie, qui comprend notamment une imposante bibliographie (essentiellement en italien) sur l’orgue. On peut également retracer sans effort le site consacré à Gottfried Silbermann, objet de mon prochain pèlerinage.

Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur Gottfried Silbermann vous attend en effet à l’adresse suivante :

http://www.islandnet.com/~arton/silbeng.html

C’est le rêve : imaginez un site avec une carte de la Saxe (patrie des Silbermann), la description du musée Silbermann de Frauenstein (avec photo), les photographies des orgues de Freiberg, les coordonnées de la Société Silbermann, les possibilités d’hébergement dans la région. De là, on « clique » sur les liens vers l’inventaire (bilingue allemand-anglais) des 45 orgues de Silbermann par ordre chronologique, et on trouve, en prime, la discographie des enregistrements réalisés sur ces instruments, avec adresses des compagnies de disques (on peut donc se procurer ces enregistrements souvent introuvables en Amérique).

De quoi vous donner le goùt de voyager et pas seulement virtuel!


L'orgue sur le Web
par André Côté

Bien que le réseau internet permette d’abattre toute frontière à l’échelle planétaire, les liens que je vous suggère, dans cette deuxième chronique, se réfèrent tous à des sites canadiens ou américains.

On ne peut parler d’orgue en Amérique du Nord sans faire allusion à l’American Guild of Organists (http://www.agohq.org). Cette association, aux dimensions impressionnantes, regroupe près de 20 000 membres. Le site comporte de l’information concernant l’association et ses différents chapitres, les activités, les congrès national et régionaux, les concours d’orgues parrainés par l’AGO et la revue officielle The American Organist Magazine.

Plus près de nous, le Collège royal canadien des organistes – CRCO (http://www.rcco.ca) trouve également sa place dans le cyberespace. Information sur le centre national et les centres régionaux qui sont eux aussi branchés, publications, émission et liens touchant le monde de l’orgue; voilà l’essentiel au menu de ce site. Une page particulièrement intéressante pour les organistes est celle où l’on peut consulter une liste de postes disponibles.

Du côté québécois, je vous suggère deux sites:

Le premier est celui des Orgues Létourneau, de Saint-Hyacinthe (http://www.letourneauorgans.com). Ce site, de présentation agréable avec ses nombreuses photos, nous fait connaître l’équipe qui compose le noyau de cette entreprise ainsi que les plus récents travaux de restauration et de construction menés au Canada, aux États-Unis, et en Australie. Un seul reproche possible envers ce site : il n’est présenté qu’en langue anglaise. Il faut cependant admettre qu’avec la pénurie de projet de construction d’instruments neufs au Québec, il peut être légitime de vouloir rejoindre le marché potentiel.

Toujours du côté des sites québécois, on peut prendre contact avec Syncordia International (http://www.syncordia-intl.com - site fermé en 2004). Cette entreprise, établie à Saint-Lambert, présente, comme l’annonce la page d’accueil, « la solution du XXIe siècle pour l’orgue à tuyaux «. L’équipe de Syncordia, sous la direction de M. Pierre-Yves Asselin, a pour but de mettre les technologies les plus récentes au service de la musique et de ses instruments, spécialement l’orgue à tuyaux traditionnel, tout en respectant l’authenticité et l’art de la facture des instruments de musique. On y fait le développement et la fabrication de combinateurs, électro-aimants, contacts, pédalier MIDI, etc.

Pour terminer cette chronique, une curiosité de l’invention humaine : le célèbre orgue du Convention Hall, d’Atlantic City : (http://www.acchos.org) présumé le plus gros au monde avec ses 33 112 tuyaux sur 455 rangs (1 439 tirages) et une console à 7 claviers (la console secondaire à 5 claviers est maintenant inutilisée). D’autres informations, ainsi que des photos de ce monstre, sont disponibles sur le site d’Arthur Goulet (http://theatreorgans.com/atlcity/).


Nouvelles de Québec
par Irène Brisson

  • Concerts
    • La 30e saison des Amis de l’orgue de Québec s’est terminée brillamment par deux activités d’envergure : le concert anniversaire du 21 mai donné par Raymond Daveluy et l’Orchestre symphonique de Québec dirigé par Gilles Auger, et le voyage culturel annuel qui s’est exceptionnellement déroulé sur deux jours et qui a permis aux Amis de l’orgue de Québec de fraterniser, les 14 et 15 août, avec les membres de la FQAO et les participants à l’Académie d’orgue et de clavecin de Rimouski.

      L’automne est arrivé et, avec lui, une nouvelle saison prometteuse. Elle a commencé avec un concert « portes ouvertes » donné par Marc D’Anjou qui avait inscrit à son programme des œuvres de Buxtehude, de Böhm, de Bach (la Passacaille), de Widor (Allegro de la 6e symphonie), de Henri Gagnon, de Boëllmann (Suite gothique) et de Dupré. L’organiste titulaire de la Basilique Notre-Dame de Québec a eu droit, dès la fin de la première partie, à une ovation debout bien méritée. Ce premier concert, qui a attiré beaucoup d’auditeurs aux Saints-Martyrs-Canadiens, sera diffusé dans le courant de l’hiver par Radio-Canada. Il était dédié à la mémoire du regretté organiste et musicologue Lucien Poirier, décédé le 7 juin dernier.

      La saison se poursuit avec un concert de Jean-Guy Proulx, qui a remplacé, à quelques jours d’avis, Luc Beauséjour, (1er novembre, Basilique Notre-Dame de Québec), le traditionnel concert de Noël avec Sylvain Doyon, Sonia Racine, le Chœur symphonique de Québec, et le chœur d’enfants La Chanterie, dirigés par Louise Delisle-Bouchard (21 décembre, Saints-Martyrs-Canadiens). La saison reprendra, en 1998, avec un concert de musique de notre siècle, ayant pour invité Jean Le Buis (7 mars, Saints-Martyrs-Canadiens), suivi d’un concert orgue-clavecin d’œuvres des XVII et XVIIIe siècles donné par Anne-Marie Forest et commenté par Irène Brisson (25 avril, Maison généralice des Sœurs du Bon-Pasteur, Sainte-Foy). La saison pendra fin le 16 juin, à Loretteville, avec le concert très attendu de Michaël Radulescu qui sera, rappelons-le, membre du jury du Concours d’orgue de Québec.

      Comme on l’aura constaté, les Amis de l’orgue de Québec restent fidèles à leur idéal : faire connaître, sur les plus beaux instruments de la région, tous les aspects du répertoire d’hier et d’aujourd’hui par des artistes étrangers et québécois.

  • Nouveau conseil d’administration
    • Lors de l’Assemblée générale du 15 octobre dernier, les Amis de l’orgue de Québec ont élu un nouveau conseil d'administration, composé des membres suivants :

        Marc-Aurèle Thibault, président; Claude Beaudry, vice-président; Michel Boucher, trésorier; Jean-Pierre Retel, secrétaire; Noëlla Genest, directrice artistique; Suzanne Boulet, Irène Brisson, Marc D’Anjou, Monique Dupuis, Louise Fortin-Bouchard, Paul Grimard, Geneviève Paradis, Richard Paré, Louise Provencher, Stéphane Saint-Laurent, conseillers.


    Anniversaires en musique
    par Irène Brisson

    L’année 1998 s’annonce assez prometteuse pour les organistes. Voici le premier volet de quelques anniversaires à ne pas manquer :

    1648 a vu naître le renommé facteur d’orgues allemand Arp Schnitger (mort en 1719) auquel on doit quelques 150 instruments dont ceux des principales églises de Hambourg (Sainte-Catherine, Saint-Jacques, Saint-Nicolas, Saint-Michel) et de Saint-Marie de Lübek.

    Cette même année naissait également l’organiste Johann Michael Bach (mort en 1694). Oncle et beau-père (à titre posthume) de Johann Sebastian, puisqu’il était le père de Maria Barbara (première femme de Bach), Johann Michael Bach est moins célèbre que son frère aîné Johann Christoph (1642-1703), auquel il succéda à Arnstadt en 1665. Il se fixa, à 25 ans, à Gehren (Thuringe) comme organiste et… greffier municipal. Ses concitoyens le disaient « sage, bien élevé et habile en son art » et « habile constructeur de différents instruments nouvellement inventés ».

    Son manuscrit, comprenant 72 préludes et chorals, mentionné par Ernst Ludwig Gerber (Lexikon, 1812) étant perdu, il nous reste, de lui, quelques jolis petits chorals pour orgue, typiques de l’esthétique nord-allemande de la fin du XVIIe siècle. De plus grande envergure sont ses onze motets et ses cinq cantates qui témoignent d’un métier solide et d’une grande ferveur hérités de l’école de Schütz.

    Un anniversaire qui ne devrait pas passer inaperçu est le 250e de la mort d’un petit-cousin de Johann Sebastian Bach, Johann Gottfried Walther (1684-1748). Né à Erfurt, il exerça, à partir de 1707, ses talents d’organiste et de compositeur à la cour de Weimar où Bach séjourna de 1708 à 1717. Le duc de Weimar et son neveu Johann Ernst s’intéressant particulièrement à la musique moderne italienne, Walther transcrivit, pour orgue, de nombreux concertos des principaux auteurs à la mode (Corelli, Torelli, Albinoni, Vivaldi). Son influence en ce sens sur Bach est indéniable. Il composa une centaine de pièces pour clavier : quelques préludes ou toccatas et fugues et surtout des chorals d’une grande limpidité contrapuntique, que Bach « plaçait plus haut, d’après une confession écrite, que ses propres travaux1 » et dont Mattheson affirmait que « rendre justice à Walther nécessiterait un livre2 ». On lui doit également, en 1732, le premier grand dictionnaire de musique en allemand (Musikalisches Lexicon) ainsi qu’un traité de musique. Espérons que cette année nous donnera l’occasion de redécouvrir, en concert et par le disque, les plus belles œuvres de ce musicien.


    1
    Vierstimmiges Choralbuch, 1799. Cité dans Bach et son temps, de Gilles Cantagrel, Paris, Hachette, collection Pluriels, 1982, p. 334
    2
    Mattheson : Der Volkommene Capellmeister, 1739, p. 476. Cité par Heinz Lohmann dans sa préface à l’édition des oruvres d’orgue de Walther, Breitkopf, 1966, vol. 1, p. XVIII.


    Revue des revues
    compilée par Denis Morneau
    La Tribune de l'orgue
    REVUE SUISSE ROMANDE
    Guy Bovet
    CH-1323 Romainmotier, Suisse
  • 49e année, No 2 (juin 1997)
    Concours [éditorial] - Correa revisité: promesses (enfin) tenues - L'orgue de Luigi Ferdinando Tagliavini à Portalban - La « Declaracion de los organos... » (1587) de Diego del Castillo ou les quatre orgues de Gilles Brebos à l'église de l'Escorial - Les voyages de M. Philéas Fogg - Cours, concours, académies... - Disques.
  • 49e année, No 3 (septembre 1997)
    Internet [éditorial] - « Les grandes orgues » - Les quatre orgues de la croisée du Dom de Salzbourg - Photo-mystère: éclaircissements - Mme B.P. - Corrections à apporter dans l'édition Kastner des Tientos de Correa de Arauzo (suite) - Les voyages de M. Philéas Fogg - L'orgue à chats d'Athanase Kircher (1601-1680) - L'orgue de salon de Pierre Vallotton - Revue de presse - Livres - Musique - Nouvelles - Disques.
  • Point d'orgue
    BULLETIN DE LIAISON DE L'ASSOCIATION DES AMIS DE L'ORGUE DE LA VENDÉE,
    3 rue Victor-Hugo,
    85580 Saint-Michel-en L'Herm, France
  • No 84 (juin 1997)
    Le mot du président – L'orgue de l'église Notre-Dame-du-Port de l'Île d'Yeu [dossier] - L'orgue de l'église Saint-Fulgent [dossier] - 4e Académie d'orgue de Chavagnes en Paillers - Enregistrement sur le Cavaillé-Coll de la cathédrale de Luçon - Découverte des grandes orgues de Paris - Interlude (suite) - Dates à retenir: récitals, converts, informations.
  • Bulletin d'information de l'Association des amis de l'orgue de Versailles et
    de sa région

    20 rue Montbauron,
    78000 Versailles, France
  • No 37 (mai 1997)
    Assemblée générale du 8 mars 1997 - Les centenaires en 1997 - Léon Boëllmann (1862-1897) - Schubert a-t-il écrit de la musique d'orgue? - L'oeuvre d'orgue de Brahms - Le Conservatoire national de région de Versailles a un nouveau directeur - Un texte de Camille Saint-Saëns sur l'orgue - Regards sur le répertoire: la musique à programme et le poème musical dans le répertoire de l'orgue - Les orgues de la cathédrale de Nantes - L'orgue Parisot de Notre-Dame-de-Guibray à Falaise - Le nouvel orgue de l'église abbatiale de Lessay - Disques de musique d'orgue parus ou réédités entre janvier et avril 1997 - Écouté pour vous - Livres, concours, stages et concerts - Dermière minute: Auditions 1997 de la classe d'orgue du Conservatoire de Versailles; Visite de l'orgue de l'église Siant-Symphorien à Versailles.
  • No 38 (octobre 1997)
    Concert pour un maître - Présentation de Christophe Mantoux, successeur de Georges Robert à la classe d'orgue du Conservatoire de Versailles - Mort d'un grand pianiste - Visite de l'orgue de l'église Saint-Symphorien à Versailles - Auditions 1997: classe d'orgue du Conservatoire de Versailles - Récital d'orgue du « Mois Molière » à Versailles - Les Amis de l'orgue de Québec fêtent leurs 30 ans - Le grand orgue historique de la cathédrale Saint-Louis... ou les vicissitudes d'un grand seize pieds - Inauguration des grandes orgues de l'abbaye Sylvanès en Aweyron - L'univers musical de Léon Boëllmann à la Bibliothèque Nationale de France - Bibliothèque Nationale de France: département de la musique - La musique dans les bibliothèques de la ville de Paris - Les éditions discographiques de la Médiathèque musicale de Paris - Publications des Amis de l'orgue - Nouvelles constructions et restaurations d'orgue - Concerts et festivals - Disques de musique d'orgue parus ou réédités entre mai et septembre 1997 - Écouté pour vous - Omission.
  • Le Tuyau
    Bulletin de liaison de
    « Connaissance et pratique de l'orgue »
    Montpellier
  • no 21 (1er semestre 1997)
    Éditorial - Une page se tourne - Livres et revues reçus - Chronique discographique - L'harmonium, un instrument en voie de disparition? (4e partie) - Dictée musicale à la manière de Bernard Pivot - Liste des numéros antérieurs encore disponibles.
  • Musica et Memoria
    ASSOCIATION ÉLISABETH HAVARD DE LA MONTAGNE,
    Le Moulin Blanc,
    87300 Bellac, France
  • no 66-67 (juin-septembre 1997)
    « À l'approche de l'an 2000 » - Théophile Gautier, sa famille et la musique - Jean Françaix, un musicien bien français - Les grandes orgues de l'abbaye d'Ourcamp - Revue des revues - Obituaire des musiciens - Eugène Münch, un organiste de génie et un chef d'orchestre hors du commun.
  • L'orgue
    Revue jurassienne indépendante
    F. Widmer
    4, chemin de la Criblette
    CH-1603 Grandvaux
    Suisse
  • no 1 (mars 1996)
    Le billet de la présidente - L'esthétique de Carl Philipp Emanuel Bach, à propos de ses oeuvres pour orgue (I) - Pour la proclamation de Pâques: le tropaire pascal et deux chorals incontournables (Psaumes et Cantiques 305, 303 et 322) - Une biographie de Samuel Ducommun (1914-1987) - L'orgue de choeur de l'église réformée de Cully VD.
  • No 2 (juin 1996)
    Le billet du président - L'orgue Tschanun (1924) de l'église anglaise de Lausanne (Christ Church) - L'esthétique de Carl Philipp Emanuel Bach, à propos de ses oeuvres pour orgue (II; suite et fin) - Insolite... - Deux instruments restaurés dans le Haut-Valais: Reckingen et Münster.
  • No 3 (septembre 1996)
    Éditorial - Les nouvelles orgues du temple Saint-Gernais à Genève - Jehan Alain (1911-1940): jeunesse et éternité - Organiste ou autre instrumentiste? - L'événement discographique: les psaumes hugenots, de Goudimel à Gagnebin - Connaissez-vous vraiment votre psautier? - Un CD à signaler: l'oeuvre d'orgue de Johannes Brahms à la Stadtkirche d'Olten - L'orgue de l'église anglaise de Lausanne: addenda - Ordo missae: chronique d'un crime... remis à plus tard?
  • No 1 (mars 1997)
    Billet pour un nouvel envol... - Une forte pensée d'Armin Jordan (chef de l'Orchestre de la Suisse romande)... - Éditorial - Communiqué de l'Association fribourgeoise des organistes - Les instruments récents de la Manufacture d'orgues Ayer Sarl à Vauderens FR - Jean-Sébastien Bach - De Neuchâtel à Vuisternens-en-Ogoz FR: tribulations et renaissance du vieil orgue de la collégiale - « Jeunisme » et démagogie.
  • No 2 (juin 1997)
    Éditorial - Hommage à Jean-Charles Frochaux - Le facteur d'orgue fribourgeois Henri Wolf-Giusto (1875-1931) - Souvenirs du Sacré-Coeur - À propos de l'orgue de l'église Sacré-Coeur à La Chaux-de-Fonds: description de quelques problèmes de restauration et esquisse d'appréciation esthétique - Spiritualité de l'oeuvre d'orgue d'Olivier Messiaen - L'orgue de l'église Notre-Dame de Neuchâtel.
  • Grand Jeu
    Fédération des orgues de la Côte-d'Or
    Dijon
  • Numéro spécial
    Actes du colloque « Autour de Kerl Joseph Riepp », Dijon, 8 mars 1996, 77p.
  • Orgue Canada
    Journal triannuel du Collège royal canadien des organistes (RCCO / CRCO)
  • Octobre 1997
    Convention Review: Niagara National 97 - An address to Convocation - RCCO's Historic Qillan Recording set for Release - Who Sings, Prays Twice - President's Corner - National Office Notes - 1997 National Organ Playing Competition - Positions available in Canada - Opinion: The Days of the Choir are Over - News in the Canadian Scene.